Entendez-vous ? Tendez l’oreille et écoutez bien la musique qui surgit, son rythme effréné, les corps en mouvement, le progrès sur place, la combinaison du tout dans le grand rien. Certains ont parlé en leur temps de “révolution permanente” ou de “coup d’état permanent”, l’on dit même que le “compromis permanent” est l’atour de la démocratie sociale. La révolution ne sera pas samplée.
Quel compromis que celui du mélange de paroles et de sons dans un même pot-pourri afin d’en ressortir le dénominateur commun, un propos sans propos, une révolution sans révolution, une mélodie sans mélodie, la somme pour créer la somme, ne surtout pas la commenter, la surcharger, la surclasser. Rien de nouveau ne peut être créé dans le compromis permanent sinon le commun. La révolution ne sera pas samplée.
Son rythme effréné engourdi les sens, l’ego disparait dans la répétition incessante d’ondes mécaniques, la réflexion subordonnée aux mouvements corporels, la musique s’agite et gesticule pour affirmer sa présence, s’exclamer dans le soi de chaque, puis, lorsqu’elle reprend sa place, qu’elle s’étend à l’ensemble, elle se calme, s’endort et assoupi le monde avec elle. Le mouvement est subordonné au compromis permanent, fulgurant lorsqu’il est en danger, apathique lorsqu’il reprend sa place. La révolution sera compromise dans la masse du prolétariat tertiaire.
La musique d’antan ressurgit par vagues, extraits mélodiques bouclant sans fin dans le neuf, rappels incessants d’un présent passé, nostalgie abyssale engloutissant les oreilles futures, liant le compromis dans un passé présent. Le compromis compromet les résistants et les compromis dans des passés isolants. La révolution ne sera pas samplée.
La dissidence ne peut exister qu’en marge, qu’en idiot utile, qu’en molosse des troupeaux les plus radicaux, laissée de côté tant qu’elle n’existe pas réellement, sous peine d’être vilipendée, trahie puis samplée dans le compromis permanent. Il faut au compromis permanent une ouverture, sa marge gloutonne, son avant-garde discrète. La révolution ne sera pas samplée.
J’aime cette musique, la découvrir et la vivre, je rêve la fin du compromis permanent. La révolution sera improvisée.
Fable de Ma Fontaine
Cigale ayant milité
Tout l’Été,
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue.
Pas un seul petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Elle alla crier famine
Chez la Fourmi sa coquine ;
La priant de lui prêter
Quelque grain pour subsister
Jusqu’à la saison nouvelle. -
Vous auriez payé, lui dit-elle,
Avant l’Oût, foi d’animal,
Notre combat principal.
La fourmi n’est pas prêteuse ;
C’est là son moindre défaut. -
Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à cette emprunteuse. -
Nuit et jour à tout venant
Je militais pour votre aise. -
Il est vrai, j’en suis fort aise !
Eh bien, votez maintenant.